Faut-il changer d’entreprise tous les 3 à 5 ans ? La vraie question que les cadres devraient se poser

Comment désapprendre les vieux réflexes managériaux pour mieux piloter en 2025 ?
28 avril 2025

Nous avons tous, un jour, cherché la réponse à cette question : combien de temps faut-il rester dans une entreprise ?

En 2016, certaines études et articles avançaient que, comme en amour, une aventure professionnelle durait en moyenne trois ans. En 2025, les recommandations s’élargissent : on parle désormais de cycles de 3 à 5 ans.

Ces chiffres alimentent l’idée d’un plan de carrière structuré, pensé pour atteindre différents objectifs. Les plus fréquents ? Augmenter sa valeur sur le marché ou booster son salaire.

Et donc, au fil d’une carrière, la question revient en boucle : « Est-ce que je dois partir maintenant ? Est-ce que je vais rater une opportunité si je reste trop longtemps ? »

À force de se demander « quand partir », on en oublie parfois de se demander : « pourquoi rester ? »

Cet article invite à se poser d’autres questions. Celles qui engagent l’avenir professionnel mais aussi l’équilibre personnel, l’énergie et le sentiment d’alignement. Car la vraie question n’est peut-être pas « à quelle fréquence faut-il changer », mais plutôt : « comment savoir si c’est le bon moment pour vous ? »

1. Changer d’entreprise tous les X ans : mythe, norme ou mirage ?


Les articles et conseils carrière le martèlent depuis quelques années : pour rester compétitif, il faudrait changer de poste tous les 3 à 5 ans. Un idéal théorique largement relayé par des plateformes reconnues.

Mais que disent vraiment les faits ?

Selon une étude Expectra, les cadres français en 2024 prévoient de rester en moyenne moins de 10 ans dans une entreprise (contre 14 ans en 2023). Chez les 25-34 ans, la durée moyenne tombe à 6,8 ans (source : Groupe Randstad). Dans les métiers du digital ou du conseil, la mobilité est encore plus forte, avec des cycles de 2 à 4 ans.

Autrement dit, la mobilité est bien réelle, mais elle varie selon l’âge, les secteurs, les aspirations et les conjonctures économiques. Il n’existe pas de fréquence idéale. Il existe des moments opportuns, des équilibres personnels et des chemins qui ne se ressemblent pas.

Changer peut être une stratégie, mais ce n’est jamais une obligation. Certains construisent leur carrière avec une fidélité assumée, d’autres multiplient les expériences comme autant de leviers d’apprentissage. Ce sont la cohérence, le sens, et la progression qui comptent.

2. Changer pour gagner plus : une stratégie efficace, mais à double tranchant


Les chiffres sont clairs : changer d’entreprise peut booster les revenus. Selon l’Insee, un changement d’employeur entraîne en moyenne une hausse salariale de 13,2 % (Expectra, 2023). En interne, les augmentations se limitent généralement à 1 à 3 % par an.

Ce différentiel s’explique : à l’embauche, les entreprises revalorisent souvent davantage les salaires pour séduire de nouveaux talents que pour fidéliser les collaborateurs déjà en poste. C’est un angle mort du système.

Mais attention au revers de la médaille : à force de courir après la hausse, certains enchaînent les postes au détriment de leur équilibre, de leur stabilisation ou de leur réputation. Des changements trop fréquents sur un CV peuvent interroger : manque de constance ? difficulté d’intégration ? instabilité ?

D’autant plus que chaque changement implique une période d’incertitude, une phase de re-onboarding, une prise de risque personnelle et professionnelle. Le gain immédiat doit être mis en balance avec la dynamique de fond.

Il faut donc arbitrer : est-ce le bon moment pour vous, maintenant ? Et pour quoi faire : plus de revenu, de sens, de challenge, de reconnaissance ?

3. Le sens, ce critère devenu incontournable (mais pas unique)


Depuis 2020, la crise sanitaire a provoqué un basculement profond dans les attentes professionnelles. La quête de sens est devenue centrale dans les choix de carrière. Une étude d’Audencia indique que 67 % des cadres placent le sens au travail comme critère n°1 de changement. Ce besoin de cohérence, d’impact positif, d’utilité réelle n’est plus marginal, il devient structurel.

Mais attention aux caricatures : les jeunes cadres (25-35 ans) placent encore le salaire en priorité n°1, avant le sens (source : Cadremploi). L’un n’exclut pas l’autre, surtout dans un contexte de pression financière.

Il ne s’agit donc pas d’opposer le sens et le revenu, mais de comprendre ce qui motive le changement : la fuite d’un environnement trop rigide ? La fatigue ? L’envie d’un projet plus aligné ? La nécessité financière ?

Chaque motivation est légitime si elle est assumée. Et c’est ce travail d’introspection qui rend un départ pertinent.

4. Pouvoir d’achat en baisse : une mobilité subie ?


Selon une enquête ITG 2024, 61 % des cadres estiment que leur pouvoir d’achat a diminué depuis la crise sanitaire. Cette perception influence fortement les choix de carrière : certains n’attendent plus les revalorisations internes et vont chercher ailleurs les conditions de vie qu’ils estiment mériter.

Pour autant, cette mobilité est parfois plus subie que choisie. Il ne s’agit pas toujours d’un projet d’évolution, mais d’un réflexe de survie économique. C’est là que le risque se situe : partir sans vision, juste pour compenser une frustration immédiate, peut conduire à des déceptions à répétition.

D’autres encore font le choix d’augmenter leur volume horaire plutôt que de changer d’entreprise, dans l’espoir d’un maintien de niveau de vie. Mais cela peut altérer l’équilibre global et engendrer un sentiment de lassitude ou de décrochage progressif.

5. Les bons signaux pour envisager de partir


Changer d’entreprise devrait être une décision réfléchie, guidée par des signes clairs. Voici quelques indicateurs à surveiller :

  • - Vous n’avez plus de perspectives d’évolution à court ou moyen terme
  • - Vous n’apprenez plus rien depuis plusieurs mois
  • - Vous ne vous sentez plus aligné avec les valeurs ou les décisions de votre entreprise
  • - Votre engagement diminue, sans que vous compreniez vraiment pourquoi
  • - Vos contributions ne sont plus reconnues
  • - Vous vous sentez isolé(e) ou démotivé(e) de manière durable

  • Parfois, ce n’est pas l’entreprise qui a changé. C’est vous. Vos attentes ont évolué, vos repères aussi. Et c’est justement ce qui peut rendre légitime un nouveau départ.

FAQ - Aller plus loin

1Faut-il changer d'entreprise pour évoluer ?
Parfois oui. Le changement peut offrir un nouveau titre, de nouveaux projets, une dynamique différente. Mais l’évolution peut aussi se faire en interne : promotion, mobilité transverse, formation, changement de périmètre.
2Est-ce mal vu de changer souvent d’entreprise ?
Pour répondre à cette question : Quel est votre évaluation ? Comment évaluez-vous cela sur le terrain ?
3Combien d'années faut-il rester dans une entreprise ?
Il n’y a pas de durée standard. En moyenne, les cadres français restent entre 6 et 10 ans. L’important est de ne pas rester par habitude, mais par choix. Et de savoir réactiver son engagement.
4Quand faut-il penser à changer d'entreprise ?
Quand le poste n’apporte plus de satisfaction, d’apprentissage ou d’opportunités. Quand l’équilibre vie pro/perso est compromis. Ou quand vos valeurs ne sont plus alignées avec celles de l’entreprise.